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Hommage à Paulette Sarcey: Allocution de Raphaele Sarcey – 3 Novembre 2021

Bonjour à tous !

Salut à toi !

On prend les mêmes et on recommence. Belote, rebelote et me revoilà à devoir parler de toi à un pupitre.

Les mêmes, c’est pas vraiment vrai.

Aujourd’hui il y a ceux qui n’ont pas pu venir te dire au revoir au Père Lachaise l’année dernière.

Les trémolos dans la voix m’ont quittée.

Je parle de toi si souvent. Avec maman, avec Judith, Fabien, nos enfants, mes amis et même ceux que je connais peu…

Comme une toute petite fille je dis : bah moi ma grand-mère elle était incroyable, elle était résistante et elle est revenue du pire.

Une fierté ça c’est sûr et aussi, je crois, comme un avertissement à mon interlocuteur : attention à ce que tu vas dire sur un certain nombre de sujets… Un peu comme une gardienne de l’histoire et de la vérité.

Tu sais on est devenus complètement zinzins ici.

On a adopté un chien. On a quitté Paris Belleville pour vivre à la campagne tout près de la mer. On y est bien. Loin de l’agitation. Mais encore beaucoup trop près des bruits qui se font entendre ces temps ci.

Je te dis ils sont tous devenus zinzins !! Et que Pétain aurait sauvé les juifs de France, et qu’on a qu’à laissé mourir les réfugiés aux portes de chez nous, et que nos prénoms ne sont pas assez français. Je ne peux pas te faire la liste ici, ça nous donnerait la nausée à tous…

Ils me font peur, ils t’auraient révoltée.

Nous avons eu drôlement de la chance de t’avoir comme grand-mère ! Une grand-mère incroyablement aimante, souvent rude, extrêmement exigeante et tellement drôle. Promis je ne raconte rien ici de toutes les conneries que tu faisais pour nous faire marrer. Non non. Ici on célèbre la grande dame. Celle qui toute jeune s’est battue pour la liberté, qui a subi les tortures, les humiliations et qui a survécu au projet d’extermination. On célèbre celle qui a passé sa vie à raconter l’horreur pour que jamais elle ne s’efface des consciences.

Nous avons eu de la chance de t’avoir comme grand-mère. Tu nous as offert un magnifique exemple de courage, de dignité, d’ouverture au monde, de révolte, d’empathie et d’indignation. Je crois que nous sommes, tes enfants, tes petits-enfants et tes arrières petits enfants, des gens bien. Des mensch comme tu l’aurais dit.

Tu as laissé derrière toi une très belle famille, des livres, des documentaires et certainement des traces dans le cœur de certains collégiens et lycéens pour lesquels tu as raconté.

Tu as fait du bon boulot !

Aujourd’hui c’est notre tour de faire le job ! On laissera rien passer, on remettra l’histoire à sa place, on sera vigilants.

Cette plaque peut-être, je l’espère, rendra curieux de toi certains passants et permettra surtout d’inscrire dans le marbre cette traversée qui est la tienne certes, mais celle de millions d’autres.